La visite

A ma bonne amie Bertina

Je ne te l’avais pas dit
(Parce que je voulais t’en faire la surprise)
Je ne t’avais pas dit qu’on les a ressuscités :
La maison où tu es née, le moulin de ta jeunesse…
Et quand nous sommes allées comme les étés passés
En pèlerinage dans la vallée,
J’ai guetté sur ton visage
Un signe de ton émotion.
Si grande a été ta surprise
Que tu en es restée figée !
… Toutes deux, main dans la main, comme autrefois
Nous sommes allées vers le propriétaire : un Étranger aimable.
Je vous amène, Monsieur, la dernière meunière !
Vous avez bavardé un moment.
… Au retour tu es restée muette et songeuse :
— Qu’est-ce que tu as, Bertina ? Je vois une larme !
— Je ne sais pas trop… Tout est changé.
— Trop beau, n’est-ce pas ? C’est des riches.
— Je m’étais habituée aux ruines. Elles me désolaient, oui.
Mais elles étaient ce qui reste du Passé.
Une époque nouvelle se lève sur mon vieux Monde
Je n’irai plus dans la vallée.

2 août 1964

(Traduction Paol Keineg)

Ce poème en breton

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